Chère famille, chers amis,
Mais qu'on se le dise, apprécier le voyage qu'est la vie relève parfois de l'héroïsme !
Jeudi 9 septembre - Jour 106
Phyllis est une amie de l'amie de Jo, rencontrée au café d'Elkton. Le téléphone arabe marche très bien aux Etats-Unis et les dames papotent toujours, n'est-ce pas ? Ni une, ni deux, Phyllis prend sa voiture et me cherche sur la route qui va à Clarksville. Pas difficile de trouver un chapeau sur un sac à dos qui longe la route : nous échangeons nos blogs, mail, numéros de téléphone... Et ce jeudi soir, me voilà invitée dans un joli restaurant avec Phyllis !
Suivront deux jours franchement pénibles : gros serpent (mort !), trafic monstre près de Clarksville, puis de nouveau, les trous paumés au milieu des bois, des
accueils plus inhabituels, des pieds qui en ont eu ras-le-bol et des genous en préavis de grève, le moral qui s'est enfui dans les trous (bien réels) de chaussettes !! Ce Tennessee a
beau avoir une guitare légendaire...
...j'y passe les pires instants du voyage.
Dimanche 12 septembre - Jour 109
Mais ce matin, arrivée à la paroisse St Patrick de McEwen, tout s'est métamorphosé. La petite Eglise catholique d'ici, Saint Patrick, est une véritable oasis. Le père Michael et ses paroissiens me réservent un accueil remarquable. La grâce du sacrement de confession, celle de l'Eucharistie, une homélie qui nourrit l'âme, la charité d'une communauté paroissiale et d'une communauté de Dominicaines, voilà qui regonfle le moral en berne, redonne force aux pieds et courage aux genoux.
Susan est l'organiste de la petite paroisse. Enthousiasmée par mon pèlerinage, elle m'invite au Subway du coin. Elle non plus, n'est pas originaire du Tennessee et ne s'y sent pas mieux que
moi... Question de feeling. Les gens sont aussi gentils qu'ailleurs, mais comme je l'ai dit ci-dessus, on y rencontre aussi des comportements plus étonnants. Mais la charité pardonne tout, excuse
tout, supporte tout, alors... je préfère m'attarder sur les belles choses que je vois... Et ce matin-là, j'ai profondément ressenti à quel point l'Église catholique est une Mère auprès de
laquelle nous pouvons venir nous abriter, nous ressourcer. Et si j'ai pu le ressentir, c'est que la communauté paroissiale, par son prêtre, a construit cette petite oasis de paix. Le voyageur est
sensible aux atmosphères des lieux qu'il traverse et à McEwen j'ai vu "combien ils s'aiment."
Les jours suivants, je continue de longer l'interminable route 70, tantôt à 2 voies, tantôt à 4 a voies. L'immense Lake Kentucky (qui correspond au fleuve Tennessee) s'étire du nord au sud, et seuls 4 ponts l'enjambent. Je trouve la zone franchement quelconque, voire carrément moche. Et de toute façon j'ai le moral dans les trous de chaussettes, alors je vois forcément tout en gris... C'est comme ça, ça va passer !!!! Cherchez pas à comprendre !!
Mardi 14 septembre - Jour 111
Petit-déjeuner au "Mimi's Café". La gérante est pro-vie et me présente à deux pasteurs méthodistes et un pasteur baptiste, attablés là. Les Américains ne sont pas, comme nous autres Français, complexés de prier au restaurant. La vie spirituelle fait partie de la vie quotidienne, ils n'ont pas peur de leur Foi. Alors tous trois prient pour moi, pour que Dieu m'accorde un "safe trip". Merci à Donna, David et Tom ! Plus loin, voilà une voiture qui s'arrête. Une jeune maman avec deux enfants. Et hop, nous nous donnons tous la main, comme on fait ici, et elle prie pour moi...
Mercredi 15 septembre - Jour 112
J'en ai plein le dos, plein les pattes. Je n'avance pas. Frère l'âne est rebelle en ce moment. Mais il faut respecter les rythmes du corps, c'est le meilleur moyen de ménager sa monture et de se donner des chances d'arriver au bout... En attandant, il faut se contenter de ce que l'on trouve en chemin :
des gentilles bestioles, des terrains vagues désaffectés, des garages que la crise économique a fermés...
Mais, oh surprise, voilà du coton !! Je m'en vais donc bel et bien vers le sud !! La végétation change, mes érables et leur précieux sirop sont déjà loin !!
En arrivant à Huntington, je cherche l'église de la Sainte Famille. C'est incroyable comme le Saint Esprit va me guider ce soir. Je rencontre d'abord un monsieur qui va chercher son courrier. Si j'ai bien compris, son gendre a un salarié, Jim, qui fait partie des "Knights of Colombus". Il lui téléphone. Ils ont justement à 18 h 15 une réunion a l'église. Jim vient me chercher en voiture. Ils m'invitent à partager leur repas et finalement m'offrent une nuit dans l'hôtel voisin où, me trouvant fort bien, je resterai une nuit supplémentaire, histoire de me refaire les forces et le moral, et demain, vendredi, je pourrai repartir en pleine forme !
Un immense merci pour l'hospitalité de ces Chevaliers de Colombus !!
Ce jeudi, pour achever de me réconcilier avec le Tennessee, voilà que je m'assois dans un Pizza Hut. Mon accent intrigue la serveuse. Et je redis l'objet de mon pèlerinage.
Du coup ça papote en cuisine. La chef sort :
- Vous marchez ? Alors en cadeau de la maison, je vous offre votre repas. Je suis le boss, je peux bien faire ça pour vous.
En plus de ça, je repars avec une pizza pour le soir. Et je vous quitte maintenant pour aller la manger !!!
Mais je ne peux pas m'empêcher de vous partager cette invitation de Jean-Paul II aux femmes :
"Vous devez réconcilier les hommes avec la vie."
Bonne méditation !
Anne-Marie